Ensemble, responsables et combatifs !

En pleine crise sanitaire, tous les accès de fièvre ne sont pas dus au COVID-19 : les profits que les entreprises s’apprêtent à verser aux actionnaires du CAC 40 (53 milliards d’euros, +6 % depuis 2019) font chauffer les thermomètres ! « Socialiser les pertes et privatiser les gains » : ce principe libéral continue de rimer avec austérité, dumping social et casse des services publics.
Invitation à la bienséance pour les uns ; ordonnances et régressions sociales pour les autres !


Mesures gouvernementales : rien contre le capital

« L’invitation » de Bruno Le Maire aux entreprises qui ont accès au chômage partiel, c’est-à-dire qui ont leurs salariés payés par l’Etat, « à ne pas verser de dividendes » semble bien timide, pour ne pas dire incantatoire. En même temps, il n’hésite pas à affirmer que « tous les moyens » à disposition seront utilisés « pour protéger les grandes entreprises françaises » !

La « concorde exceptionnelle » face à la crise que le Premier ministre appelle de ses voeux, continue donc de rimer avec intérêts particuliers plutôt qu’avec intérêt général !

En effet, le Gouvernement n’a pas tardé à dégainer des ordonnances pour augmenter la durée maximale de travail hebdomadaire et rogner sur les congés payés des travailleurs.

Ces dispositions permettent, par exemple, à tout employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates des jours de réduction du temps de travail, des jours de repos prévus en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités d’utilisation définies par le Code du travail ou les accords collectifs. Elles permettent également de déroger aux repos hebdomadaire et dominical, à la durée du temps de travail.

Jamais à court de bonnes idées, le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, lance, quant à lui, une cagnotte, ou plutôt un « grand appel à la solidarité nationale » dans la lutte contre le coronavirus. Pas de rétablissement de l’ISF, d’augmentation d’impôts sur les grandes fortunes, ou d’arrêt de l’optimisation fiscale en vue ! De l’argent pour le capital et pas pour le travail, en propre comme en figuré !

Face à l’urgence que convoque la situation sanitaire, les salariés font face !

Infirmières, aides-soignantes, urgentistes sont en première ligne avec des protections trop souvent dérisoires ! À défaut de liberté et d’égalité, c’est la fraternité qui s’invite aux fenêtres chaque soir pour applaudir ces héros. Caissières, assistantes maternelles, personnels de nettoyage, employés à la collecte des déchets ménagers, salariés des transports… et cheminots luttent également aux avant-postes !

La dignité, l’abnégation et l’engagement sans faille dont ils font preuve dans la lutte contre le coronavirus sont les seuls à même d’emporter la victoire ! Il ne saurait être question qu’une fois acquise, celle-ci leur soit confisquée par des mesures de régression sociale !

Des mesures contre le travail

La loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 a été adoptée par le Parlement le 22 mars 2020. Cette loi prévoit, entre autres, la création d’un état d’urgence sanitaire et des modifications du code du travail et de la sécurité sociale, renvoyées à des ordonnances. Déclarer l’état d’urgence permet de prendre des mesures particulièrement restrictives des libertés individuelles et publiques sans passer par les procédures habituelles, notamment le Parlement.

Les principales ordonnances qui impacteront les salariés :

Congés payés, jours de repos :

« …Un accord d’entreprise ou de branche peut déterminer les conditions dans lesquelles l’employeur est autorisé, dans la limite de six jours de congés et sous réserve de respecter un délai de prévenance qui ne peut être réduit à moins d’un jour franc, à décider de la prise de jours de congés, y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris, ou à modifier unilatéralement les dates de prise de congé. »
« …L’employeur peut imposer que les droits affectés sur le compte épargne-temps du salarié soient utilisés par la prise de jours de repos, dont il détermine les dates en respectant un délai de prévenance d’au moins un jour franc. »
« Le nombre total de jours de repos dont l’employeur peut imposer au salarié la prise ou dont il peut modifier la date ne peut être supérieur à 10. »

Dérogation aux règles relatives à la durée du travail (article 11, I, 1, b) :

dans les secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation ou à la continuité de la vie économique et sociale, l’employeur pourra déroger aux règles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical. La durée quotidienne du travail peut être portée à douze heures, de jour comme de nuit. La direction de FRET SNCF veut imposer des journées de 14h ! La durée du repos quotidien peut être réduite à 9h (contre 11 actuellement). La durée hebdomadaire du travail peut être portée jusqu’à 60h. On peut donc sérieusement s’interroger sur l’intention réelle du Gouvernement.

Règles applicables à la demande d’autorisation d’activité partielle :

le décret est applicable aux demandes d’activité partielle effectuées à compter de la date d’entrée en vigueur du décret (le 27 mars 2020), au titre du placement en position d’activité partielle de salariés depuis le 1er mars 2020.

Actuellement, la demande, adressée au préfet, doit impérativement avoir lieu avant de réduire l’activité. Il n’est possible de faire la demande a posteriori que lorsque la suspension de l’activité est due à un sinistre ou des intempéries. Dans ce cas, elle doit avoir lieu dans les 30 jours qui suivent le passage en activité partielle.

Le décret ajoute un nouveau cas de figure : les circonstances de caractère exceptionnel, ce qui fait sans aucun doute référence à la propagation du virus COVID-19 et aux mesures de confinement, qui ont de sérieuses conséquences sur le fonctionnement des entreprises. Les salariés au forfait pourront désormais bénéficier de l’activité partielle. Les entreprises publiques y sont éligibles.

La CGT insiste sur le besoin de distinguer les secteurs essentiels, (santé, alimentation, services publics…) avec l’obligation de protéger la santé des salariés, des autres secteurs, notamment industriels. Elle refuse l’idée d’unité nationale face à un Gouvernement qui refuse d’entendre, depuis plus de 10 jours, les demandes qui lui sont formulées en matière économique et sociale. Les polémiques organisées contre des syndicats, ou des salariés qui refusent de travailler sans protection, sont scandaleuses. Ces ordonnances restent majoritairement contraires aux intérêts des salariés.

Les cheminots en première ligne

Comme d’autres professions, notre travail nous expose particulièrement aux pandémies : contact massif avec le public, contact avec de nombreux autres travailleurs (sous-traitants, prestataires), lieu de travail confinés (trains, ateliers, bases vie, plateformes téléphoniques, bureaux en open-space…). L’absence de matériel de protection (réquisitionné par l’Etat) a donc logiquement conduit à une très forte contamination des cheminots. Au 25 mars, 365 cheminots étaient « malades confirmés », soit 0,24 % rapporté aux effectifs. Cela peut paraître faible, mais c’est 8 fois plus que la population française, et cela ne reprend que les malades sérieux (il y en a beaucoup plus de « suspectés », dont les symptômes ne sont pas graves). Les cheminots sont donc, eux aussi, durement frappés par l’épidémie !

Cependant, le 31 mars, il y avait 418 cas confirmés, soit une hausse de 15 %, alors que le nombre de malades dans la population française a doublé (52128).

Cela signifie que les mesures drastiques préconisées par la CGT (arrêt des activités non-indispensables, protection ou retrait des cheminots devant travailler…) ont produit des effets non négligeables.

Dans ces conditions, les dirigeants qui poussent pour la reprise du travail sont des inconscients !

La reprise ne pourra s’envisager qu’après les pics épidémiques dans toutes les régions et lorsque les tests systématiques des agents pourront être faits (ce que la CGT a demandé dans un courrier adressé au Président Farandou).

En attendant, la priorité doit être la protection de la santé des cheminots !

Pas question de payer la facture

Les interventions de la CGT visent, en premier lieu, à protéger les cheminots, en faisant en sorte qu’ils ne soient pas incités à s’exposer inutilement au risque pour des raisons financières. Par ailleurs, la CGT considère que les cheminots ne doivent pas pâtir de la crise sanitaire en cours.

C’est en ce sens que la Fédération CGT des cheminots a porté plusieurs exigences :

  • qu’aucun cheminot ne soit incité financièrement à se mettre en danger ;
  • que les cheminots appelés à travailler pour maintenir les productions essentielles ne subissent aucun manque à gagner du fait de la réduction d’activité ;
  • qu’aucun cheminot non-utilisé pour quelque raison que ce soit, ne subisse de perte de salaire.

Plusieurs éléments de rémunération ont été maintenus suite aux interventions de la CGT cheminots auprès à la fois de la DRH nationale, mais également des directions métiers.

  • maintien du traitement, indemnité de résidence, prime de travail, indemnités fixes mensuelles pour tous les cheminots ;
  • neutralisation des effets de la baisse d’activité sur l’acompte congés des agents de conduite ;
  • neutralisation du manque à gagner en EVS pour les cheminots travaillant, par l’octroi d’une « indemnité compensatrice exceptionnelle de service restreint » d’un montant de 2,34 € à 13,54 € selon la filière et la qualification.

La CGT poursuit ses interventions pour neutraliser les effets financiers sur les cheminots, notamment s’agissant de l’impact des journées de travail réduites sur la prime de travail réelle, primes de traction par exemple.

Par ailleurs, nous serons extrêmement vigilants sur l’éventuelle application des mesures liées à la possibilité du chômage partiel, afin que la direction s’engage à ce que ce dispositif n’ait aucune incidence sur les cheminots.

Des dangers demeurent en matière salariale, qui pourraient avoir des effets contraires aux mesures de prévention, notamment :

  • les dérives managériales préexistantes qui font que la rémunération de certains cheminots comporte une part excessive d’EVS en lieu et place du salaire. Cette absence de reconnaissance des qualifications conjuguée à des perfusions d’EVS incitent certains cheminots à s’exposer volontairement au risque, qu’il s’agisse du travail de nuit, du travail isolé ou actuellement du travail sans protection, ou sans faire valoir un arrêt maladie ;
  • la GIR et ses objectifs qui ne sont pas revus pour le moment, et qui incitent certains encadrants à vouloir relancer la production en dépit du bon sens et du principe de précaution.

La Fédération CGT des cheminots poursuivra ses interventions, avec les cheminots, pendant cette crise sanitaire et au-delà, afin de lutter contre l’ensemble de ces substituts de salaire qui mettent quotidiennement en danger les cheminots, individuellement et collectivement, et remettent en cause la reconnaissance des qualifications.

DISPOSITIF CONGÉS ET REPOS : une attaque sérieuse aux droits des cheminots

Assurer la continuité du service public ferroviaire et le maintenir en état, afin qu’il fonctionne le plus rapidement et le plus efficacement possible à la sortie de la crise sanitaire, est un enjeu crucial pour la Nation comme pour l’entreprise. Cependant, cela ne peut servir de prétexte au Gouvernement et à la direction pour amputer les cheminots de leurs droits aux repos et aux congés.

Nous dénonçons avec force l’application des ordonnances gouvernementales en la matière contenues dans le Temps Réel n°35 du 1er avril 2020 édité par la direction SNCF. Les cheminots n’ont pas à subir la perte de leurs congés ou de leurs repos dans un contexte qu’ils n’ont pas choisi. Par ailleurs, ils œuvrent précisément à la solidarité concrète chaque jour en assurant leurs missions.

En ce sens, l’appel de la direction SNCF « à la solidarité nationale » est indécent. Les cheminots, de par leurs métiers, leurs fonctions et leur attachement indéfectible à assurer la continuité du service public ferroviaire au cœur d’une crise sanitaire et sociale sans précèdent, n’ont pas de leçon de ce type à recevoir.

La Fédération CGT réaffirme sa volonté de se tenir auprès des cheminotes et cheminots en toutes circonstances, en continuant d’agir chaque jour afin de les conforter dans leurs droits. 

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