Audience CGT avec le président de SNCF RESEAU – Compte-rendu

Dans le cadre du projet « Nouvel’R » qui vise à redéfinir la stratégie et l’organisation de SNCF Réseau, le Président JEANTET a reçu les organisations syndicales en bilatérales. La CGT a été entendue le 20 décembre 2017.
Ce compte-rendu est donc destiné à faire connaître aux cheminots la teneur des échanges.

En préalable, la CGT a fait les remarques suivantes :

La stratégie du GPF SNCF est tributaire des décisions politiques.

Or, nous sommes extrêmement inquiets par le contenu du rapport d’étape du Conseil d’Orientation sur les Infrastructures, présidé par Philippe DURON, publié le 13 décembre 2017.

Celui-ci insiste sur les investissements à réaliser pour le mode routier (pour éviter de se retrouver dans la situation des infrastructures ferroviaires) et renvoie le train à la desserte des zones denses.

Or pour la CGT, se débarrasser des petites lignes aura un impact néfaste sur le réseau dit « structurant ». Cela ne peut qu’aboutir à une contraction progressive du mode ferroviaire et à sa marginalisation durable, comme on l’a vu dans le FRET, ou comme c’était le cas dans le voyageur avant la fin des années 90.

La Direction SNCF ne doit pas accepter ou faciliter une telle évolution.

L’externalisation est un danger pour le groupe public

Elle menace le maintien des savoir-faire des cheminots sans que les entreprises privées sous-traitantes soient capables d’acquérir et de fixer réellement ces compétences. Elle a donc un impact négatif sur la sécurité et sur la qualité du travail.

Elle fragilise les résultats financiers comme le démontre le budget 2018 présenté au CCGPF du 13 décembre 2017 (le coût des emplois Equivalent Temps Plein sous-traités est bien supérieur à celui des cheminots, ce qui diminue d’autant la Marge Opérationnelle).

Elle hypothèque l’avenir de l’entreprise puisque toutes les nouvelles technologies liées au numérique sont développées en externe. La CGT considère que la SNCF a déjà fait face à des transformations technologiques majeures qu’elle a toujours su parfaitement assumer. Il faut donc développer les nouvelles compétences en interne pour assurer la pérennité de la maîtrise technique cheminote.

Les injonctions contradictoires doivent cesser

Le plan de charge est actuellement énorme et les calendriers sont extrêmement contraints, notamment en région parisienne.

Dans cette situation, la Direction devrait mettre en place des moyens supplémentaires pour s’assurer de tenir les objectifs dans de bonnes conditions.

Mais c’est l’inverse qui se produit puisque pour 2018, la Direction estimait que la hausse de charge de travail nécessitait la création de +737 emplois et au final c’est 0.

Pour la CGT, l’accroissement important de la productivité couplé aux contraintes de temps est totalement incohérent et va avoir des effets dramatiques pour l’entreprise et les cheminots.

Il faut des moyens pour travailler correctement !

Pendant plus d’une heure, le Président JEANTET a présenté le projet Nouvel’R et répondu à nos critiques et interrogations.

La Direction confirme que l’abandon des petites lignes est envisagé pour concentrer les moyens sur « la partie la plus pertinente du réseau ».

Elle partage notre constat que les sous-traitants n’ont pas acquis de compétences satisfaisantes à ce jour, mais elle espère qu’ils le feront dans l’avenir. Elle ne remet donc pas en question le développement de la sous-traitance et espère qu’à terme ces entreprises seront source d’innovation. Elle dit néanmoins vouloir conserver une part significative de charges de travail, notamment pour maintenir les compétences nécessaires au contrôle des chantiers.

Sur le projet Nouvel’R, la Direction nous a présenté les 2 axes :

La stratégie générale

A la régénération du réseau, la Direction veut ajouter sa modernisation dans les plans de l’Etat. Elle en espère un gain important de capacités (ex : le développement l’ERTMS 2e génération pourrait conduire à un gain de 20% sur un axe comme Paris-Lyon, ou à une amélioration de la qualité sur d’autres axes).

Concernant la robustesse, SNCF Réseau veut jouer un rôle plus important dans l’intégration de l’exploitation (ex : assurer la compatibilité des plans de transports TGV, IC et TER).

Enfin, concernant l’ouverture à la concurrence, il s’agit de s’adapter avec « l’objectif que la qualité de service n’en souffre pas ».

L’organisation

La Direction veut séparer et clarifier le rôle des structures de prescription et des structures de production.

Elle souhaite distinguer clairement la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’oeuvre.

Elle veut instaurer un pilotage par la gestion d’actifs c’est-à-dire avoir une vision du coût complet des projets et donc de leur pertinence sous l’angle financier.

Enfin, elle veut développer ce qu’elle appelle une politique commerciale à savoir une logique « client-fournisseur » (ex : facturation de chaque acte produit pour les « clients », pro activité, etc…).

Ces axes sont encore susceptibles d’évoluer. Le groupe de travail devrait présenter officiellement ses conclusions au plus tard début mars 2018.

Pour la CGT, l’abandon des petites lignes remettrait en cause toutes les valeurs du service public ferroviaire et menacerait l’ensemble du réseau. C’est la conséquence d’un désengagement financier de l’Etat et la confirmation de la politique du tout routier.

Le changement d’orientation, indispensable pour l’équilibre des territoires, l’environnement et l’emploi, suppose la constitution d’un rapport de forces de haut niveau qui porte la défense du mode ferroviaire.

Si les petites routes de campagne peuvent être financées à 100% par l’Etat et qu’il y a une véritable volonté de report modal, alors les petites lignes peuvent être financées elles aussi par l’Etat. Le rôle de la SNCF est d’en assurer l’entretien, la promotion et le développement !

Concernant la sous-traitance, les dangers sont concrets alors que les espoirs restent virtuels. Si la Direction cherche de l’innovation, elle peut la trouver en interne, pour peu que les services en aient les moyens et la latitude.

Concernant la concurrence, la Direction reconnaît qu’elle est génératrice de risques et donc que l’objectif est uniquement de préserver la situation actuelle (et non de l’améliorer). La CGT ne peut être que confortée par de tels aveux qui prouvent que l’ouverture à la concurrence est une démarche dogmatique, néfaste pour le chemin de fer.

Concernant le projet Nouvel’R, si la CGT note avec intérêt le retour d’une certaine intégration de la production (pilotage commun et territorialisé des EIC, IFP et IFL), nous contestons formellement la recherche de développement des relations « clients-fournisseurs » avec les activités de SNCF Mobilités (ou d’autres opérateurs) qui ne peut qu’accroître les conflits d’intérêts et donc l’inefficacité du système.

La CGT va demander une audience nationale au chef de projet afin de préciser certains points, notamment les changements envisagés concernant la maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’oeuvre.

En conclusion

Cette audience confirme que le Gouvernement actuel veut développer une politique anti-ferroviaire. La libéralisation du secteur ne peut aboutir qu’à une contraction du mode. Les assises du ferroviaire, la mission Spinetta et toutes les autres démarches en cours ne visent qu’à justifier cette politique. Les cheminots doivent prendre conscience de la portée des attaques en cours qui vont abattre le service public, l’entreprise publique et dégraderont profondément les conditions de travail et les conditions sociales.

Un autre avenir est possible. La CGT considère que la SNCF et le mode ferroviaire sont des outils extraordinaires qui pourraient améliorer la vie des citoyens de ce pays. Mais pour cela, il va falloir que les principaux intéressés – les cheminots – manifestent leur refus de casse de leur entreprise et de leurs métiers.

La CGT appelle les cheminots à s’inscrire en masse dans la manifestation nationale du 8 Février 2018 à Paris, pour une politique publique pro-ferroviaire, la préservation de l’emploi, de nos savoir-faire et de nos conditions sociales.

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